Deux soirées exceptionnelles sur « Rossini ou l’avènement du bel canto romantique » les 29 et 30 novembre 2018.
Grâce à la Dante, les amateurs de musique et d’opéra, qu’ils soient ou non membres de l’association, ont eu le privilège d’assister à quatre conférences exceptionnelles. Deux soirs de suite, fin novembre, Patrick Favre-Tissot a tenu sous le charme un auditoire encore plus nombreux le vendredi que le jeudi. Il faut dire que le sujet s’y prêtait. La vie de Rossini (1792-1868), homme plein d’esprit, fourmille d’anecdotes pittoresques, des petites fiasques dessinées sur les lettres à sa mère pour signaler l’échec – le fiasco – de certaines de ses œuvres à la première calamiteuse du « Barbier de Séville » émaillée d’incidents, de sa paresse et de sa facilité légendaires (ne dit-on pas qu’il préférait réécrire un air plutôt que de se lever pour ramasser la partition ?) aux recettes de cuisine élaborées durant son séjour parisien. Les occasions de rire n’ont donc pas manqué ! Mais c’est surtout à la personnalité du conférencier que l’on doit ce succès. Patrick Favre-Tissot, qui fêtait à cette occasion ses trente ans de conférences à la Dante du Puy, non seulement connaît son sujet sur le bout des doigts, mais c’est un vrai spectacle qu’il offre à un public enthousiaste, chantant, mimant, imitant. Le brio n’enlève rien au sérieux de l’exposé. Impossible de résumer en quelques lignes huit heures de conférences, illustrées par des enregistrements choisis avec soin et des images de grande qualité. Patrick Favre-Tissot a mis l’accent sur les nouveautés apportées par Rossini à l’opéra, fait découvrir à un auditoire qui ne connaissait en général de Rossini que ses « opere buffe » de sublimes « opere serie ». Il a aussi fait revivre, avec en toile de fond l’histoire d’une grande moitié du XIXe siècle, l’opéra italien mais aussi européen (Rossini voyagea beaucoup) avec ses cantatrices (Rossini avait épousé la Colbran en 1822), ses salles (le San Carlo, la Scala), ses directeurs de théâtre et ses imprésarios… tout cela accompagné de citations de Stendhal, auteur d’une « Vie de Rossini ».
Découverte d’un compositeur, d’une œuvre mais aussi d‘une époque, celle de la fin de l’opéra baroque et de l’avènement de l’opéra romantique et du grand opéra « à la française ». Bref, deux soirées exceptionnelles grâce à un conférencier d’exception, dans un climat convivial, chacun ayant pu échanger ses impressions durant l’entracte autour de pizzas fort appréciées !
Concluons par ces mots du maestro Rossini : « Manger, aimer, chanter et digérer, voilà les quatre actes de l’opéra-comique qui a pour nom la vie et se dissipe aussi vite que l’écume d’une bouteille de champagne. Quel parfait imbécile que celui qui le laisse s’enfuir sans l’avoir savouré. »
Texte de présentation des conférences consacrées à : Gioacchino ROSSINI (1792-1868), « Le Cygne de Pesaro » ou l’avènement du Bel Canto Romantique
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Entre Bologne, Milan et Venise : sur la voie du succès (1792-1815)
Rossini naît à Pesaro dans la province des Marches en 1792.
Après une jeunesse agitée, nous le suivons dans les étapes de sa peu orthodoxe formation, pour ses débuts au théâtre lyrique à l’âge de 18 ans. Nous assistons à ses premiers triomphes véritables en 1813 : « Tancrède » (pour le domaine de « l’opera-seria »); « L’Italienne à Alger » ( pour celui de « l’opera-buffa »). Toute cette partie de son existence se déroule, de plus, sur un fond historique mouvementé où celui qui se nomme d’abord Bonaparte, puis Napoléon Ier, joue un rôle considérable à l’arrière-plan.
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La période napolitaine et l’éclosion d’un nouveau style (1815-1818)
Le « grand » Rossini va véritablement se révéler à Naples. Composant surtout des opéras tragiques (ce que l’on ignore le plus souvent) pour les plus grands chanteurs de l’époque, il parvient, presque inconsciemment, en quelques années, à édicter des principes nouveaux pour construire les partitions. Du coup, c’est l’opéra italien dans son ensemble qui s’en trouve transfiguré et même réformé.
Mais, imposer une révolution n’est pas chose facile et Rossini, du coup, alterne régulièrement les succès et les fiascos (le plus monumental étant, en 1816, paradoxalement, celui de son œuvre aujourd’hui la plus célèbre : « Le Barbier de Séville » !).
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De Naples à Paris en passant par Vienne et Venise (1818-1823)
Les dernières années de Rossini à Naples consacrent la naissance d’éblouissants chefs-d’œuvre : « Moïse« , « La Dame du Lac« , « Mahomet II « …
Commençant à se déplacer à l’étranger, Rossini conquiert Vienne où il rencontre Salieri et Beethoven.
En 1823 à Venise avec « Sémiramis« , il signe l’acte de décès du genre « opera seria » d’une manière éblouissante, avant de partir à la conquête de Londres et Paris.
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Le chant du « Cygne » et l’entrée dans la légende (1823-1868)
C’est à Paris que Rossini achève sa carrière de compositeur avec « Guillaume Tell » en 1829. Dès lors, il se retire de la vie active, n’écrivant plus que pour le cercle de ses amis chers. Mais son action se poursuit dans d’autres domaines et il participe ainsi à la révélation des jeunes talents musicaux (musiciens et interprètes). Toutefois, cette dernière partie de son existence où les anecdotes croustillantes fourmillent nous révèle surtout un homme plein d’esprit et de lucidité, témoin ironique des événements et des goûts de son temps.
P.F.T.B.
DISCOGRAPHIE SÉLECTIVE : Gioacchino ROSSINI (1792-1868),
OBSERVATION : Compte tenu des grandes lacunes de la discographie rossinienne et ses imperfections dans l’interprétation, nous sommes parfois amenés à citer plusieurs enregistrements en référence.
Les 6 Sonates pour cordes // I Solisti Italiani DENON
LA CAMBIALE DI MATRIMONIO // Pratico, De Simone, Rossi // Viotti CLAVES
LA SCALA DI SETA // Sciutti, Jacopucci, Rinaldi // Ferrara RCA
LA PIETRA DEL PARAGONE // Carreras, Wolff, Foldi, Diaz // Jenkins RICORDI
IL SIGNOR BRUSCHINO // Capecchi, Maugeri, Carbi, Vinco // Gerelli RCA
TANCREDI // Horne, Cuberli, Palacio, Zaccaria // Weikert CBS
L’ITALIANA IN ALGERI // Horne, Ramey, Palacio, Trimarchi // Scimone ERATO
AURELIANO IN PALMIRA // Barbacini, Serra, Müller-Molinari, Cava // Zani ARS NOVA
IL TURCO IN ITALIA // Ramey, Caballé, Nucci, Dara, // Chailly CBS
ELISABETTA REGINA D’INGHILTERRA // Caballé, Carreras, Masterson // Masini PHILIPS
TORWALDO E DORLISKA // Valentini-Terrani, Cuberli, Niemsgern // Zedda VOCE
IL BARBIERE DI SIVIGLIA // Gobbi, Callas, Alva, Ollendorf, Zaccaria // Galliera EMI
Prey, Berganza, Alva, Dara, Montarsolo // Abbado DGG
Allen, Baltsa, Araiza, Trimarchi, Lloyd // Marriner PHILIPS
OTELLO // Carreras, Pastine, Von Stade, Fisichella, Ramey // Lopez-Cobos PHILIPS
LA CENERENTOLA // Simionato, Montarsolo, Benelli, Bruscantini // De Fabritiis DECCA
Berganza, Montarsolo, Alva, Capecchi // Abbado DGG
Valentini-Terrani, Dara, Araiza, Trimarchi // Ferro CBS
LA GAZZA LADRA // Ricciarelli, Ramey, Matteuzzi, Furlanetto, Manca di Nissa,
D’Intino, Coviello // Gelmetti SONY CLASSICAL
ARMIDA // Gasdia, Merritt, Ford, Matteuzzi // Scimone ARTIS
ADELAIDE DI BORGOGNA // Devia, Dupuy, Bertolo, Caforio // Zedda FONIT CETRA
MOSÈ IN EGITTO // Raimondi, Anderson, Lewis, Niemsgern, Fisichella // Scimone PHILIPS
ERMIONE // Gasdia, Palacio, Zimmermann, Merritt, Alaimo // Scimone ERATO
LA DONNA DEL LAGO // Ricciarelli, Gonzales, Raffanti, Valentini-Terranni, Ramey
//Maurizio Pollini CBS
Anderson, Blake, Merritt, Dupuy, Surjan // Muti PHILIPS
BIANCA E FALLIERO // Ricciarelli, Horne, Merritt, Surjan // Renzetti FONIT-CETRA
MAOMETTO II // Ramey, Zimmermann, Palacio, Anderson, Dale // Scimone ERATO
SEMIRAMIDE // Sutherland, Horne, Rouleau, Serge, Malas // Bonynge DECCA
Tamar, Scalchi, Pertusi, Kunde, D’Arcangelo // Zedda WARNER FONIT
Studer, Larmore, Ramey, Lopardo, Rootering // Marin DGG
ZELMIRA // Gasdia, Matteuzzi, Merritt, Fink, Senator, Garcia // Scimone ERATO
IL VIAGGIO A REIMS // Ricciarelli, Ramey, Valentini-Terranni, Raimondi, Dara,
Cuberli, Nucci, Gimenez, Gasdia // Abbado DGG
LE SIÈGE DE CORINTHE // Lippi, Serra, Raffanti, Caforio, Comencini // Olmi NUOVA ERA
LE COMTE ORY // Aler, Jo, Cachemaille, Quilico, Montague // Gardiner PHILIPS
GUILLAUME TELL // Bacquier, Caballé, Gedda, Kowats, Mesplé, Taillon // Gardelli EMI
GUGLIELMO TELL // Zancanaro, Studer, Merritt, Surjan, Roni, Felle // Muti PHILIPS
STABAT MATER // Ricciarelli, Valentini-Terrani, Gonzalès, Raimondi // Giulini DGG
Quatuor Vocal « Il Carnevale di Venezia » // Le Lieder Quartett & Christian Ivaldi ARION
« Ouf ! les petits pois ! », pièce pour piano des « Péchés de vieillesse » // Bruno Mezzena ITALIA
Mélodie » L’addio di Rossini » // Marilyn Horne & Martin Katz SONY CLASSICAL
LISTE DES OPERAS DE ROSSINI : (Titre, genre, librettiste, année et lieu de création)
DEMETRIO E POLIBIO : dramma serio // Vincenzina Vigano-Mombelli 1812, Rome Teatro Valle
LA CAMBIALE DI MATRIMONIO : farsa comica // Gaetano Rossi 1810, Venise San Moisè
L’EQUIVOCO STRAVAGANTE : farsa // Gaetano Rossi 1811, Bologne Teatro del Corso
L’INGANO FELICE : farsa // Giuseppe Foppa 1812, Venise San Moisé
CIRO IN BABILONIA : dramma // Francesco Aventi 1812, Ferrare Teatro Communale
LA SCALA DI SETA : farsa comica // Giuseppe Foppa 1812, Venise San Moisè
LA PIETRA DEL PARAGONE : melodramma giocoso // Luigi Romanelli 1812, Milan Teatro alla Scala
L’OCCASIONE FA IL LADRO : burletta per musica // Luigi Privadeli 1812, Venise San Moisé
IL SIGNOR BRUSCHINO : farsa giocosa // Giuseppe Foppa 1813, Venise San Moisé
TANCREDI : melodramma eroico // Gaetano Rossi 1813, Venise Teatro La Fenice
L’ITALIANA IN ALGERI : dramma giocoso // Angello Anelli 1813, Venise San Benedetto
AURELIANO IN PALMIRA : dramma serio // Gianfrancesco Romanelli 1813, Milan Teatro alla Scala
IL TURCO IN ITALIA : dramma buffo // Felice Romani 1814, Milan Teatro alla Scala
SIGISMONDO : dramma // Giuseppe Fonda 1814, Venise Teatro La Fenice
ELISABETTA REGINA D’INGHILTERRA : dramma serio // Giovanni Schmidt 1815, Naples San Carlo
TORWALDO E DORLISKA : dramma semiserio // Cesare Sterbini 1815, Rome Teatro Valle
ALMAVIVA OSSIA L’INUTILE PRECAUZIONE (puis : IL BARBIERE DI SIVIGLIA)
Opera buffa // Cesare Sterbini 1816, Rome Teatro Argentina
LA GAZETTA : opera buffa // Giuseppe PALOMBA 1816, Naples Teatro Dei Fiorentini
OTELLO
OSSIA IL MORO DI VENEZIA : dramma // Marquis F. Berio di Salsa 1816, Naples Teatro del Fondo
LA CENERENTOLA
OSSIA LA BONTÀ IN TRIONFO : dramma giocosa // Jacopo FERETTI 1817, Rome Teatro Valle
LA GAZZA LADRA : opera semiseria // Giovanni Gherardini 1817, Milan Teatro alla Scala
ARMIDA : dramma serio // Giovanni Schmidt 1817, Naples San Carlo
ADELAIDE DI BORGOGNA : dramma serio // Giovanni Schmidt 1817, Rome teatro Argentina
MOSÈ IN EGITTO : Azione tragi-sacra // Andrea Leone Tottola 1818, Naples San Carlo
ADINA
OSSIA IL CALIFFO DI BAGDAD : farsa // Marquis Bevilacqua-Aldobrandini 1826, Lisbonne Sao Carlo
RICCIARDO E ZORAIDE : dramma // Francesco Berio di Salsa 1818, Naples San Carlo
ERMIONE : azione tragica // Andrea Leone Tottola 1819, Naples San Carlo
EDUARDO E CRISTINA : dramma serio // Schmidt/Tottola/ Bevilacqua-AldoBrandini1819, Venise San Benedetto
LA DONNA DEL LAGO : melodramma // Andrea Leone Tottola 1819, Naples San Carlo
BIANCA E FALLIERO
OSSIA IL CONSIGLIO DEI TRE : melodramma // Felice Romani 1819, Milan Teatro alla Scala
MAOMETTO II : dramma serio // Cesare della Valle, Duc de Ventrignano 1820, Naples San Carlo
MATILDE DI SHABRAN : melodramma giocoso // Jacopo Feretti 1821, Rome Teatro Apollo
ZELMIRA : opera seria // Andrea Leone Tottola 1822, Naples San Carlo
SEMIRAMIDE : opera seria // Gaetano Rossi 1823, Venise Teatro La Fenice
IL VIAGGIO A REIMS : dramma giocoso // Luigi Balocchi 1825, Paris Théâtre des Italiens
(créé en cantate scénique)
LE SIÈGE DE CORINTHE : tragédie lyrique // Luigi Balocchi et Alexandre Soumet
1826, Paris Académie Royale de Musique
MOISE ET PHARAON
OU LE PASSAGE DE LA MER ROUGE : Grand-Opéra // Luigi Balocchi & Etienne de Jouy
1827, Paris Académie Royale de Musique
LE COMTE ORY : Opéra-Comique // Eugène Scribe & Charles-Gaspard Delestre-Poirson
1828, Paris Académie Royale de Musique
GUILLAUME TELL : Grand-Opéra // Etienne de Jouy, Hyppolyte-Louis-Florent Bis, Armand Marrast et Adolphe Crémieux 1829, Paris Académie Royale de Musique
NB : IVANOHE et ROBERT BRUCE ne sont que des pastiches.
Nous nous sommes volontairement limité aux opéras car ils constituent l’essentiel de l’apport rossinien.
Toutefois, il est évident que l’on ne saurait ignorer les quelques : 17 cantates profanes, 8 hymnes, 13 pièces de musique sacrée (dont Messa di Gloria, Stabat Mater, Petite Messe Solennelle), environ 60 mélodies et pièces vocales isolées, 15 pièces de musique de chambre, les « péchés de vieillesse » etc…etc…
Retrouvez les critiques musicales mensuelles de Patrick Favre-Tissot-Bonvoisin sur :
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