Mariuccia Bertolozzi, que la Dante avait invitée le 4 décembre pour parler de Boldini, portraitiste mondain de la Belle Epoque, l’avait annoncé en introduction: si le nom de Boldini ne dit rien à beaucoup de personnes, certaines de ses œuvres, elles, sont dans notre mémoire: le célèbre portrait de Giuseppe Verdi, avec son haut-de-forme et son écharpe blanche, celui du comte de Montesquiou ou encore de la Belle Otero. Boldini, qui deviendra la coqueluche des Parisiennes, est né à Ferrare en1842, 8e d’une famille de 13 enfants. Son père est peintre et restaurateur. Giovanni, après avoir étudié les grands peintres ferrarais du Quattrocento, part à Florence parfaire sa formation. Il rencontre au Caffè Michelangelo les Macchiaioli. Il peint des portraits et des paysages et a la chance de trouver des mécènes en la famille des Falconer. D’un caractère difficile (et d’un physique disgracieux), il manque ne pas terminer les fresques de leur villa La Falconiera. Il suit une autre voie que les Macchiaioli et se spécialise dans les portraits, dont il renouvelle le genre. Il situe ses modèles dans leur cadre familier, et non sur un fond uni, il les peint comme s’il les photographiait. En 1867 il va à Paris où il fait la connaissance de Degas avec lequel il se lie, de Manet, de Sisley, de Caillebotte. Il se fait inviter à Londres, où il admire les œuvres de Gainsborough. Puis le voici de nouveau à Paris où il s’installe en 1871 dans un atelier près de Pigalle avec son modèle Berthe. Il peint des paysages urbains – c’était à la mode -, fréquente des gens haut placés. Il apprécie Proust. Pour le marchand d’art Goupil il peint « en s’inspirant de Fragonard et de Watteau dans le genre anecdotique de Meissonnier et Fortuny ». Il reprend à son compte tous les clichés, il reproduit fidèlement les intérieurs, les places parisiennes, les scènes au café, au théâtre. Il peint très vite, à très grands traits. Il « portraiture » le Tout Paris, expose au Salon. Le prix de ses tableaux se met à flamber. En 1876 il va en Allemagne, en Hollande où il découvre Frans Hals, en Espagne (il y retournera en1889). Il se lasse des œuvres de commande et se consacre aux portraits de femmes de la haute société, caractérisés par un coup de pinceau fluide et hardi. Il séjourne en Italie. 1886 est une date importante, celle du portrait de Verdi. À l’exposition universelle de 1889 son portrait d’Emilia Concha de Ossa lui vaut la médaille d’or, et ses pastels féminins grandeur nature en blanc remportent un grand succès. C’est par eux qu’il atteint la célébrité, il donne une image exacte de la haute société parisienne. En 1892 il est en Italie, chez son ami le peintre Banti. Il tombe amoureux de sa fille, Alaide. Il fait son autoportrait. Il expose à New York. Il peint ses -nombreuses- bien-aimées, ses « divines ». Son portrait de Franca Florio, en 1900, déplaît à son mari, il doit la rendre plus pudique. Modernité et parisianisme sont les deux caractéristiques de Boldini. Ses tableaux deviennent de plus en plus grands, le trait se fait plus léger, les corps s’allongent, frémissent dans un art qui rejoint le maniérisme, il sait exalter les aspects les plus flatteurs, il triche avec les proportions, il peint des femmes libérées qui osent s’affirmer nues. Quand la vieillesse approche, ses tableaux deviennent plus sereins, il peint des compositions florales, Venise, quelques natures mortes. Sa cote ne cesse de grimper. Gertrude Stein dit de lui qu’il a simplifié les lignes et les plans et qu’il sera considéré comme le plus grand peintre du XIXe siècle. En 1917 il reçoit la Légion d’honneur. En 1926 il rencontre Emilia Cardona qu’il épouse en 1929, il a 87 ans, elle en a 30. Sa vue s’affaiblit. Il meurt en 1931 d’une bronchopneumonie et est enterré dans sa ville natale. Pour conclure cette conférence dont il est difficile de rendre la richesse sans la possibilité de montrer les œuvres de Boldini, Mariuccia Bertolozzi s’est permis un clin d’œil à la Belle Epoque en faisant entendre la célèbre chanson « Froufrou », reprise en chœur par l’assistance.