Le samedi 2 avril à 18h15 et le lundi 4 avril à 14h.Ce n’est pas un poisson d’avril, c’est un cadeau que fait la Dante à ses adhérents !
Ciné-Dyke, dans le cadre de sa programmation « patrimoniale », c’est-à-dire de films devenus des classiques, projettera le chef-d’œuvre néo-réaliste de Roberto Rossellini, Rome, ville ouverte (1945), avec Anna Magnani et Aldo Fabrizi (1h43). Ce film sera gratuit pour vous sur présentation de votre carte de la Dante !
Film de Roberto Rossellini (1945) avec Anna Magnani, Aldo Fabrizi, Marcello Pagliero…
Sergio Amidei et le jeune Federico Fellini participent à l’écriture du scénario.
Roma città aperta est considéré comme l’un des films les plus importants du néo-réalisme, le premier pour certains critiques. Le film sort le 27 septembre 1945 et obtient le Grand Prix du meilleur film au Festival de Cannes 1946.
Lorsque Roberto Rossellini commence à penser à ce film, les Allemands ont quitté la ville depuis quelques mois seulement, quand les troupes américaines du général Clark (avec à ses côtés le futur maréchal Juin) entrent dans Rome le 4/5 juin 1944 sans rencontrer de résistance. Les vivres manquent, la population n’en peut plus, l’industrie cinématographique est à l’agonie, Mussolini est toujours vivant, il sera exécuté par les partisans le 28 avril 1945. Le tournage commence en janvier 1945. À l‘origine le film est conçu comme un documentaire, il s’inspire de faits et de personnages réels. Trouver l’argent nécessaire relève de l’exploit, la pellicule, les moyens techniques, les studios font défaut, le film devra être post – synchronisé. Roberto Rossellini n’en est pas à son premier film, mais de 1941 à 1943 les sujets des films qu’il réalise s’inscrivent dans le cadre de la propagande cinématographique du régime fasciste.
Voici quelques repères pour ceux d’entre vous qui ne seraient pas familiers avec l’histoire de cette époque, l’une des plus tragiques qu’ait vécues l’Italie.
Le royaume d’Italie (l’Italie ne deviendra une république qu’après le référendum de juin 1946) signe en novembre 1936 un traité d’alliance avec l’Allemagne nazie (l’Axe Rome-Berlin) qui aura de funestes conséquences, en particulier sur les Juifs, et amènera à l’entrée en guerre de l’Italie le 10 juin 1940.
En juillet 1943, les Alliés débarquent en Sicile et « remontent » le long de la Péninsule mais n’arrivent pas jusqu’à Rome. Le 25 juillet 1943, Mussolini est mis en minorité par le Grand Conseil fasciste, il est arrêté sur l’ordre du roi et emprisonné. Il sera libéré par les nazis le 12 septembre et instaurera en Italie du Nord la République sociale italienne de Salò, république fantoche à la solde des Allemands. Il est remplacé comme premier ministre par le maréchal Badoglio qui, le 3 septembre, signe avec les Alliés l’armistice de Cassabile qui ne sera rendu public que le 8 septembre. C’est une rupture d’alliance, les Allemands, anciens alliés de l’Italie, envahissent l’Italie du Nord et l’Italie centrale. Les troupes italiennes sont prises au dépourvu, sans consignes claires, de nombreux soldats sont désarmés et faits prisonniers par les Allemands, d’autres essaient de rentrer chez eux. Le roi et Badoglio s’enfuient à Brindisi, derrière les lignes alliées. À Rome de violents combats ont lieu après l’armistice, se crée le Comité de Libération National, mais sans coordination, le 11 septembre, la ville capitule devant ses anciens alliés.
Le film commence durant l’hiver 1943. Pourquoi ce titre Rome ville ouverte ? Ce statut de « ville ouverte », c’est-à-dire de ville non défendue, doit permettre à des villes ne présentant pas d’intérêt stratégique mais comportant des trésors artistiques et architecturaux d’échapper à la destruction. Depuis août 1943 Rome demandait ce statut pour se protéger des bombardements alliés très violents. Rome se déclare « ville ouverte » le 10 septembre, mais c’est une déclaration unilatérale, que les Alliés ne reconnaissent pas, ni les Allemands toujours présents. Son statut de ville sainte – Rome abrite l’Etat du Vatican où se trouve le Pape- ne la protège pas non plus des bombardements qui continueront jusqu’au 4 juin 1944. En fait le patrimoine artistique sera en gros épargné mais pas les civils. Les Alliés débarquent à Anzio en janvier 1944 mais l’espoir de les voir libérer Rome est vite déçu. Les combats s’enlisent autour du monastère du Mont Cassin (janvier/mai 1944).
Le film insiste sur le rôle de la Résistance dans la lutte contre l’occupant. Comme toujours lorsque l’on parle de ce sujet, naissent les polémiques. Le film ne donne-t-il pas trop d’importance à ce mouvement, pour faire oublier que le peuple italien a soutenu le régime fasciste et combattu aux côtés des Allemands jusqu’en 1943 ? Rossellini n’évoque pas dans son film l’attentat de la rue Rasella (23 mars 1944) contre des soldats allemands (32 morts) avec pour conséquence le massacre des Fosses Ardéatines où périrent 335 italiens. Toutes les mouvances qui constituaient la Résistance n’étaient pas d’accord sur l’opportunité d’organiser des attentats qui entraînaient de féroces représailles. Fellini n’était pas favorable à ce qu’on y fasse allusion dans le film. Il fallait aussi que soient présentes les différentes composantes de la lutte partisane, en particulier les catholiques et les communistes. Le film naît à une époque où la première urgence était de « refonder » l’Italie, déchirée par la guerre civile et les occupations étrangères.